Fiche transversale / L’occupation du sol : concept, usages et bases de données
Connaitre l’occupation du sol sur son territoire est essentiel pour l’aménager et le développer durablement. Face à une tension accrue entre le besoin d’urbaniser et celui de limiter la consommation d’espaces, les acteurs territoriaux sont en demande croissante d’informations géoréférencées et régulièrement actualisées sur la couverture biophysique de leurs sols. Quelques repères pour mieux appréhender ce concept, ses usages et les bases de données associées.
Le produit
L’occupation du sol, qu’est-ce que c’est ?
Avec un taux d’artificialisation des terres en progression constante (9,7 % de la France métropolitaine artificialisé en 2018 ; 14 % à l’horizon 2050 ; 20 % en 2100 selon l’enquête Teruti-Lucas), les problématiques liées à la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers s’intensifient. L’enjeu est de concilier l’organisation des zones à urbaniser, le maintien des terres agricoles, la protection des espaces à forte valeur écologique, la prise en compte des zones à risques dans les projets d’aménagement… sur des territoires parfois exigus.
Pour aider les acteurs locaux (services de l’État, collectivités territoriales, associations environnementales, bureaux d’études…) à trouver ce délicat équilibre, il est important de leur fournir une connaissance géolocalisée, la plus précise possible et régulièrement actualisée de leur territoire. Grâce aux bases de données d’occupation du sol, ils disposent d’informations élémentaires sur la couverture biophysique de leurs sols (espaces urbanisés / espaces naturels, cultures annuelles / cultures pérennes, bâti dense / bâti diffus, forêt de feuillus / forêt de conifères…) et parfois sur leur usage (bâti résidentiel, bâti commercial, réseau de transport…).
Ces cartes d’occupation du sol répondent ainsi à plusieurs principes dont :
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l’exhaustivité des informations ou continuité géographique et thématique : elles couvrent l’intégralité d’un territoire en caractérisant chacun de ses espaces par une information associée à la couverture de son sol ;
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la cohérence temporelle : réalisées à fréquence régulière sur le même territoire (même surface, même échelle…), les cartes d’occupation du sol permettent d’en étudier les mutations.
De ces principes découlent deux grandes catégories d’usages :
- la connaissance d’un territoire, décrivant de façon exhaustive et à un instant T l’ensemble de la couverture de ses sols, et
- la mesure d’une évolution, entre deux dates données, sur un territoire donné, soit pour l’ensemble de ses espaces, soit pour seulement certains d’entre eux (ex : évolution des zones urbanisées, des zones boisées, des friches, etc.).
Les bases d’occupation du sol ont d’autres caractéristiques communes : des définitions élaborées et validées entre partenaires, des nomenclatures à plusieurs niveaux et compatibles avec des réalités de terrain différentes, et un processus de production cadré, de l’observation des images à leur interprétation.
Mais elles se singularisent par leur niveau de détails (éléments observés de quelques dizaines de m² à quelques dizaines d’hectares), leur mode de production (photo-interprétation, méthode de classification supervisée ou non supervisée, hiérarchisation de la nomenclature…) et leur fréquence d’actualisation (cf. trois exemples de bases de données, ci-après).
De nombreuses bases de données d’occupation du sol sont produites à différents échelons : européen (ex. : CORINE Land Cover et Urban Atlas dans le cadre de Copernicus), national (ex. : OCS GE par l’IGN , OSO par Theia), régional (ex. : Mos d’Île-de-France, de Loire-Atlantique et d’autres régions, OCS SAT en Auvergne-Rhône-Alpes, OCS2D du Nord-Pas-de-Calais…) et local (des parcs naturels régionaux, territoires de SCOT et agglomérations disposent de leurs propres bases de données).
Méthodologie / technique
Parmi les bases de données d’occupation du sol existantes, trois retiennent l’attention à l’échelon national : l’OSO, CORINE Land Cover et l’OCS GE.
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Theia | OSO |
Copernicus | CORINE Land Cover (CLC) |
IGN | Occupation du sol à grande échelle (OCS GE) |
Espace couvert |
France métropolitaine |
France métropolitaine / Outre-mer (partiel) / Europe (39 États) |
Près d’un tiers du territoire métropolitain couvert en 2019 |
Unité minimale d’information |
100 à 400 m² |
25 ha |
200 m² (zones bâties) à 2 500 m² (hors zones urbaines) |
Nomenclature |
23 postes, 2 niveaux hiérarchiques en 2018 |
44 postes, 3 niveaux hiérarchiques en 2018 |
14 postes pour la couverture et 17 pour l’usage (conforme aux prescriptions du groupe de travail CNIG) |
Type d’images interprétées |
Images satellitaires (Landsat-5, Landsat- 8 puis Sentinel-2) |
Images satellitaires (Sentinel-2 et Landsat-8 pour 2018) |
Images aériennes (basé sur la BDOrtho du RGE) |
Mode de production |
Automatique |
Semi-automatique |
Semi-automatique |
Mise à jour |
Annuelle |
Tous les 5 ans |
Fréquence définie entre les partenaires locaux impliqués dans le financement (potentiellement tous les 3 ans) |
Avantages |
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Limites |
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Usages et précautions
Des données et des cartes pour quels usages ?
Outils de suivi, de comparaison et d’évaluation, les cartographies d’occupation des sols servent de support de discussion et de prise de décision pour accompagner les politiques publiques. En ce sens, elles prennent place dans de multiples documents de planification territoriale : plans locaux d’urbanisme (PLU/PLUi), schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), schémas de cohérence territoriale (SCoT), schémas régionaux de cohérence écologiques (SRCE)…
Les usages métiers autour de ces cartes sont très variés :
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Aménagement / Urbanisme : suivi de l’évolution de la tache urbaine, étude de la transformation d’espaces agricoles en espaces bâtis, analyse du potentiel foncier intercommunal, etc.
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Agriculture et forêt : identification de nouvelles friches agricoles, suivi de l’évolution des vignobles ou des espaces maraîchers, étude de l’emprise forestière et de la répartition entre feuillus et conifères, etc.
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Environnement : détermination de la consommation des différents types d’espaces naturels, élaboration de la trame verte et bleue, analyse de l’érosion du littoral sur plusieurs décennies, etc.
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Risques : analyse de l’imperméabilisation des sols, études des zones risquant d’être impactées par des vagues-submersion, identification des espaces urbanisés / à urbaniser pouvant être soumis à des risques industriels…
Ces données géolocalisées sur la couverture des sols sont également largement exploitées dans le domaine du tourisme, du transport et de la mobilité, de l’énergie et du climat…
Selon la thématique étudiée, la temporalité recherchée (ex. : évaluation sur 10 ans pour les SRADDET) et le territoire concerné (région ou intercommunalité, à prédominance urbaine ou rurale…), les données utilisées pour réaliser ces cartes diffèrent. Les types de couverture des sols sont identifiés à partir d’interprétation (automatique ou non) d’images satellitaires (Sentinel-2, Pléiades, Landsat…) ou aériennes, croisées avec des bases de données de référence (BD TOPO®, RPG, fichier foncier, etc.).
Pour doter les territoires de dispositifs de suivi d’occupation du sol en temps quasi-réel, l’utilisation de l’imagerie satellitaire se répand. Dans la région toulousaine (Toulouse Métropole, Muretain et communauté d’agglomération du Sud-est toulousain), la Région Occitanie expérimente dans le cadre d’une laboratoire d’innovation teste ainsi la mise à jour de la base de données d’Occupation du sol à grande échelle (OCS GE) à partir d’images Pléiades. Cette méthode expérimentale vise à :
- produire des données de référence (échantillons d’apprentissage) à partir de l’OCS GE de l’année n ;
- développer un processus de reconnaissance semi-automatique permettant de détecter les zones en mutation à partir d’images Pléiades récentes ;
- valider ou invalider les résultats par photo-interprétation pour intégrer les zones d’évolution à l’OCS GE de l’année n + 1.
Quelle solution choisir pour répondre à ses besoins ?
Une fois son besoin clairement exprimé, le choix d’une solution prendra en compte les différents paramètres présentés ci-dessus : le territoire à couvrir, la plus petite surface cartographiée, la fréquence de mise à jour, l’adaptation de la nomenclature au besoin, l’objectif visé (avoir une connaissance exhaustive à un instant T ou mesurer une évolution entre deux dates)… et le budget disponible. A noter que certaines solutions sont gratuites, d’autres nécessitent une contribution ou un partenariat entre plusieurs acteurs régionaux.
A suivre…
Le choix de l’unité minimale d’information par rapport à une problématique donnée, l’analyse croisée des nomenclatures selon le type de couverture des sols à observer, l’interopérabilité des données entre ces trois bases d’occupation du sol… sont autant de sujets qui mériteraient des investigations complémentaires. Des études sont déjà engagées par le Cerema, notamment sur la conversion des données entre ces trois bases. Des sujets à suivre de près !
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