Observer, cartographier et évaluer les zones inondées
Observer l’évolution d’une crue, déterminer l’emprise des zones inondées ou évaluer les dégâts causés, les apports de l’imagerie satellitaire sont multiples quand il s’agit de gérer ou de prévenir les inondations. Le Cerema, missionné en cas d’aléa par des ministères et des collectivités locales, présente un panel d’usages cartographiques autour de cette thématique. Du choix des images de la crue à la définition d’indices de vulnérabilité, immersion dans la cartographique des inondations…
En 2011, le Service Central d'Hydrométéorologie et d'Appui à la Prévision des Inondations (SCHAPI) mandate le Cerema pour réaliser une première étude sur la couverture neigeuse. Pour comprendre comment se forment les stocks de neige, il apparait déjà le besoin d’analyser le système hydraulique associé grâce à des images satellitaires.
Lors du lancement du premier plan d’applications satellitaires (2011-2017), le SCHAPI oriente directement le Cerema sur le sujet des inondations. L’objectif : identifier des méthodes pour mesurer l’emprise maximale inondée, accéder aux images satellitaires en cas de crise, observer des objets sur ces images et en retirer des informations exploitables pour la gestion des inondations et la prévention du risque…
Depuis, le Cerema intervient – sur demande de ministères ou de collectivités – sur les questions d’inondations et de vulnérabilité des territoires. Son accompagnement prend plusieurs formes : aide à l’accès aux images satellitaires, acquisition et rediffusion de données, réalisation cartographique, développement d’applications, formation des agents… et alimentation du « référentiel national de vulnérabilité aux inondations ». Son dernier projet en date est un projet de recherche pour comprendre comment l’aménagement du territoire évolue au fil des crises.
La méthode / en pratique
Quand une inondation survient, la première demande est de caractériser l’aléa et de connaître l’emprise inondée sur le territoire. Pour ce faire, il est nécessaire d’acquérir une image au plus proche du pic de crue. Selon la date de prise de vue, les informations observables diffèrent : présence de l’eau sur les terres, phénomène de cure-décrue, indices de passage de l’eau sur les zones de ressuyage…
Le choix des images dépend de nombreux facteurs : l’heure de passage des satellites, l’état du couvert nuageux au moment de la crise, la résolution spatiale recherchée, les besoins exprimés… Les images Pléiades permettent de bien « reconnaitre son territoire » et d’identifier clairement les objets qui s’y trouvent (précision métrique). Lorsque les images optiques ne donnent pas satisfaction (couverture nuageuse trop épaisse), les images radar (COSMO-SkyMed, Radarsat-2, Sentinel-1…) apportent un complément essentiel d’information.
Un traitement d’images permet ensuite de cartographier l’emprise de la surface inondée de manière automatique (si l’eau est encore visible) ou manuelle (s’il s’agit d’observer des zones de ressuyage). Dans les deux cas, le processus de vectorisation sert à délimiter clairement les zones impactées par l’inondation.
Pour aller plus loin, il est également possible d’estimer les hauteurs d’eau. En croisant l’emprise inondée et un modèle numérique de terrain (MNT), les hauteurs d’eau peuvent être estimées sur différents objets. Les zones inondées sont ainsi déterminées en 3D (x, y et z), en crue comme pendant la décrue.
Avec des données complémentaires (BD TOPO®, BD ORTHO®, données issues de relevés GPS, connaissance locale sur l’état du bâti avec la crise…), les dégâts liés aux inondations peuvent aussi être facilement identifiés. Ponts arrachés, ruptures de digues, routes emportées… autant d’objets observables sur des images satellitaires prises en période post-crue.
Les résultats
Arrive ensuite le temps de la reconstruction. En comparant l’emprise spatiale d’une inondation avec la carte d’occupation du sol (forêt, route, bâtiment…) correspondante, de nombreux indices intéressant les futurs aménagements à prévoir apparaissent. Les zones constructibles et non constructibles, la révision du tracé d’une route (cf. illustration ci-dessus), l’installation d’un camping… méritent d’être étudiées au regard de ces données.
Les avantages et limites de la solution
- Les images satellites donnent une vision synoptique très utile : en un coup d’œil, les principales informations liées aux conséquences immédiates de la crise sont visibles.
- La surface inondée est analysable dans sa totalité, avec une résolution métrique sur une grande partie du territoire (plusieurs dizaines de km² observés précisément en une acquisition).
- La rapidité d’acquisition des images satellitaires en cas de crise constitue un atout indéniable. Grâce au programme Copernicus, et sa composante urgence (« Copernicus Emergency Management Service », cf. Comment accéder aux images en cas de crise ?), les données sont mobilisables en quelques heures. L’évolution de la crue peut ensuite être observée à fréquence régulière.
- La réalisation d’une cartographie d’une zone inondée par photo-interprétation, sans création d’algorithmes et mise en œuvre de traitements automatisés, peut se faire facilement grâce à des compétences de base en SIG. Pour l’extraction automatisée des zones en eau sur des images satellites, le Cerema propose un outil clé en main : le plugin Qgis Cerema CartEau (accessible à tout utilisateur formé à l’outil).
Evaluation socio-économique
- Les satellites permettent d’observer la Terre, avec une « vue de dessus ». Pour connaitre l’usage des sols (exploitation agricole, commerce…) ou recueillir des données indoor (visualisation des dommages à l’intérieur des habitations, par exemple), ces données seules ne suffisent pas.
- La présence de nuages nécessite parfois le recours aux images radar sur lesquelles les emprises inondées sont bien visibles mais les dégâts y sont difficilement observables.
Dispositif de financement utilisé
Pour aller plus loin dans la prévention du risque, le Cerema contribue aux réflexions nationales sur la vulnérabilité aux inondations (cf. Référentiel national de vulnérabilité, Cerema, 2016). Grâce à des données complémentaires, des indices de vulnérabilité peuvent être définis. Il devient alors possible d’identifier les routes praticables et celles qui ne le sont pas en période de crue, de calculer les hauteurs d’eau prévisibles à proximité des bâtiments, de connaitre les types de culture qui seront le plus impactées par les inondations, etc.