Déterminer les hauteurs d’eau à proximité des bâtiments : crue du Loing de 2016
Cartographier les zones inondées, mesurer des hauteurs d’eau ou évaluer les dégâts occasionnés, l’imagerie satellitaire présente un fort potentiel pour la gestion et la prévention des inondations. Grâce à l’étude des emprises inondées observées sur les images optiques et radar, il est même possible de déterminer les hauteurs d’eau à proximité des bâtiments. Pour étudier la crue du Loing de 2016, le Cerema a expérimenté un dispositif de télédétection intéressant en la matière.
Lors de crues exceptionnelles, il est essentiel de mesurer les hauteurs d’eau à proximité des bâtiments pour préciser leur impact sur les zones habitées. Pendant et après la crue, ces mesures répondent à de multiples enjeux : identifier les habitations immergées ou risquant de l’être (et donc les personnes en péril ou menacées), repérer les constructions (ponts, barrages, digues…) qui risquent de céder, évaluer la vulnérabilité du bâti face à d’éventuelles répliques…
Pour étudier ces hauteurs d’eau, le Cerema s’appuie sur plusieurs expérimentations réalisées en partenariat avec le Ministère de la Transition écologique et solidaire et des collectivités locales. Ces expérimentations, basées sur des méthodes de télédétection, viennent enrichir la connaissance sur la vulnérabilité des territoires et de leurs habitants. L’étude sur les hauteurs de l’eau constatées lors de la crue du Loing (Loiret) de mai-juin 2016 en est un bon exemple.
Du 28 au 31 mai 2016, plus de 100 mm de pluie tombent sur le bassin versant du Loing : environ 440 millions de m3 d’eau y sont déversés. Ces pluies intenses succèdent à près de 10 jours d’averses quasi-incessantes… Tous les habitants du bassin versant de la Seine (localisés dans le Loiret mais aussi à Paris, Rouen, La Havre…) sont concernés par cette crue hors normes qui touche tous les affluents du deuxième fleuve français par sa longueur.
La méthode / en pratique
Pour aider les acteurs territoriaux à faire face à cette crise majeure, le Cerema est sollicité à double titre. D’une part, il s’agit d’acquérir des images satellitaires des zones inondées, prises au plus proche du pic de crue. D’autre part, le centre d’études et d’expertise doit exploiter ces images pour cartographier l’emprise inondée et les hauteurs d’eau le long du Loing.
Grâce aux images fournies par les satellites Landsat (optique) et Radarsat-2 (radar), une première carte des zones impactées par la crue du Loing est réalisée. Quand la présence de l’eau apparait sur ces images, les contours de l’emprise inondée sont délimités par interprétation visuelle ou automatique (cf. fiche « Zones inondées »).
Une couche d’information complémentaire est ajoutée grâce à l’intégration d’un modèle numérique d’élévation (MNE) qui fournit des données 3D (x, y et z) sur les hauteurs des bâtiments. En comparant les données issues des images radar (bâti sous l’eau / bâti hors d’eau) et celles du MNE (hauteurs du bâti), il est alors possible de déduire simplement les hauteurs d’eau à proximité du bâti.
Si ces données sont en plus complétées par des données socio-économiques (forme du bâti, nombre d’étages par bâtiment, nombre d’occupants estimés par étage…), des indicateurs de vulnérabilité des habitations peuvent être définis.
Les résultats
Lors de la crue du Loing, des experts du Cerema ont ainsi représenté les hauteurs d’eau entourant les bâtiments. Ces derniers ont été classés en fonction des hauteurs d’eau qui les entourent (7 classes allant de moins de 0,5 m à plus de 3 m), et donc de leur degré de vulnérabilité potentielle.
Ce type de représentation fournit des indicateurs précieux pour prendre des décisions parfois cruciales. Faut-il évacuer les populations ou le maintien sur place est-il encore possible ? Quelles sont les zones d’intervention prioritaires et comment les secours peuvent-ils y accéder ? Quelles mesures conservatoires doivent être prises rapidement ?...
Après la crise, ces mesures des hauteurs d’eau à proximité du bâti (constructions individuelles mais aussi infrastructures routières, réseaux d’approvisionnement en eau et en électricité…) peuvent servir au développement de modèles prédictifs. Ces modèles permettent d’améliorer les systèmes de gestion de crise, de définir des facteurs et des seuils de vulnérabilité, de proposer des projets d’aménagement qui prennent en compte la vulnérabilité des territoires, etc.
Dispositif de financement utilisé
A ce jour, le Cerema poursuit ses expérimentations sur l’apport de l’imagerie spatiale pour caractériser les aléas, identifier les facteurs de fragilité des bâtiments et modéliser la vulnérabilité des territoires. Plusieurs secteurs (situés à Luchon, Draguignan…) sont à l’étude à partir d’images provenant de différentes constellations de satellites, issues de plusieurs millésimes.